lundi 9 octobre 2017

A la découverte du Hanoï colonial : la citadelle (secteur sud-ouest)

          L'ancienne caserne Balny d'Avricourt héberge aujourd'hui le musée d'histoire militaire du Vietnam. Ouvert tous les jours excepté le dimanche et le lundi, ce musée offre un aperçu intéressant de la première et de la seconde guerre d'Indochine, même s'il convient de prendre ses distances par rapport aux commentaires des vitrines d'exposition.


http://philippe.millour.free.fr/Indochine/CitadelleHanoi.html



1- Organisation générale du musée d'histoire militaire du Vietnam :

Une première partie du musée est visible à l'extérieur des bâtiments car les Vietnamiens ont stocké à l'air libre un certain nombre de matériels militaires pris aux Français et aux Américains. Ces matériels changent parfois et sont repeints assez régulièrement, ce qui explique que dans les photos ci-dessous, prises lors de différents voyages, le même engin puisse être de couleur différente suivant les clichés.
Une seconde partie du musée se situe à l'intérieur des bâtiments de l'ancienne caserne française et l'on peut y découvrir de nombreuses vitrines consacrées aux combats de l'armée vietnamienne depuis la fin de la seconde guerre mondiale.





Devant la tour du drapeau on trouve exposées de nombreuses pièces d'artillerie mais aussi pas mal de matériels militaires, essentiellement américains ou sud-vietnamien. D'autres matériels, notamment des avions, des hélicoptères, des blindés... sont aussi exposés sur la façade sud du musée, entre l'ancien stade Mangin et la route.








2 - Les pièces d'artillerie :


Certaines des pièces d'artillerie présentées, antérieures à la conquête française, ont parfois été fabriquées localement comme celle de la photo ci-dessous :






Parmi les pièces d'artillerie amenées de France et datant de la conquête coloniale on trouve ce canon de marine de 240 mm équipant autrefois les canonnières de la marine française. Cette pièce qui date du XIX° siècle a été retrouvée le 19 décembre 1993 au débarcadère de Thi Thiêm sur la rivière de Saigon et acheminée pour exposition depuis Ho Chi Minh Ville jusqu'au musée de Hanoï :








L'armée japonaise, lors de l'occupation de l'Indochine entre 1940 et 1945, a aussi laissé des armements comme ce canon de 75 mm qui équipait les unités :



Observations particulières :
Le canon de montagne Type 41 75 mm est une pièce d'artillerie de construction japonaise sous licence du canon allemand Krupp M.08 produite au Japon entre 1909 et 1936, et destinée à l'appui au sein des divisions d'infanterie.
D'un poids total d'environ 500 kg, la portée de ce canon initialement servi par une équipe de 13 servants, démontable en plusieurs fardeaux et transportable à dos d'animal, était d'environ 7.000 m.
Récupérés par le Vietminh, dont les artilleurs furent formés dans un premier temps par des Japonais déserteurs, ces canons furent utilisés tout au long de la guerre d'Indochine pour attaquer nos postes, comme ce fut le cas notamment à Dong Khê, ou pour prendre à partie nos bateaux de débarquement comme ce fut par exemple le cas à Nam Dinh où un des chalands de débarquement de la colonne de secours au commandant Daboval fut coulé par l'un d'entre eux. Si l'on en croit les panneaux ce canon japonais de 75 mm aurait été mis en batterie à Dien Bien Phû...


Parmi les pièces d'artillerie française on trouve également exposé ce canon de 94 mm (ou trois pouces sept) de fabrication britannique, qui aurait été capturé dans la région de Dong Khê - That khê le 4 octobre 1950, c'est à dire pendant le repli de Cao Bang :








Observations particulières :
Le canon de montagne de 94 mm (‘3.7 inches Mountain Pack Howitzer’) est une pièce de fabrication britannique datant de la première guerre mondiale mais qui a surtout été mise en oeuvre ultérieurement (et même jusqu'en 1960) en raison de sa facilité de transport et de mise en oeuvre.
D'un poids d'environ 800 kg cet obusier de montagne avait une portée de 5.500 mètres.
Si les renseignements affichés par le musée sont exacts, il se pourrait que ce soit là l'une des deux pièces qui ont été parachutées à la colonne Le Page au dessus de la plaine de Napa et qui étaient placées sous le commandement du lieutenant Claveranne. Après l'abandon de la position du Na Kheô, ces deux canons furent mis hors service grâce à des grenades ou des pots thermiques au phosphore qui introduits dans le tube permettent de souder définitivement la culasse au canon.


Une autre pièce d'artillerie française très intéressante aussi est ce canon de 105 mm qui aurait été capturé par le Vietminh à Lao Cai le 4 novembre 1950, sans doute après notre évacuation du poste :








On notera les impacts qui constellent le côté gauche de la jante de roue de ce canon, preuve que cette pièce a fait l'objet de tirs de la part de l'adversaire :


Observations particulières :
L'obusier de montagne français de 105 mm est une pièce d'artillerie produite dans le milieu des années 30 par la société d'État de Bourges (Atelier de Construction de Bourges).
Le 105 court Mle 1935 B d'un poids d'environ 1700 kg avait une portée de 10.000 mètres.
Les roues se rétractent vers l'arrière et le canon peut avoir un site très important de façon à tirer en hauteur.



Le canon de 155 mm ci-dessous aurait été pris aux Français dans la région d'Anh Khê (Thuong An) par le régiment 803 le 21 janvier 1953 :






Observations particulières :
Le canon Howitzer de 155 mm a été produit en différentes versions par les Etats Unis en grande quantité et après sa mise en service en 1942 a été utilisé jusqu'aux années 2000 dans de nombreuses armées.
D'un poids de 5.800 kg sa portée était d'environ 14.000 mètres.


Devant l'entrée du musée on trouve également ce canon de 105 HM2 qui après avoir été pris aux Français le 18 octobre 1952 lors de l'attaque du poste de Nghïa Lô, aurait ensuite été déployé à Dien Bien Phû :




On note que la prise de cette pièce d'artillerie ne s'est pas faite là aussi "dans la douceur" car on remarque sur le bouclier du canon les traces très nettes d'un impact :



Observations particulières :
Le canon Howitzer de 155 mm a lui aussi été produit en différentes versions par les Etats Unis en grande quantité et après sa mise en service en 1939 a été utilisé jusqu'aux années 2000 dans de nombreuses armées. C'est le canon de la guerre du Pacifique, de la guerre d'Indochine, de la guerre de Corée et même de la guerre du Vietnam.
D'un poids de 2.200 kg sa portée était d'environ 11.000 mètres.
Rappelons que la chute très rapide du poste de Nghia Lo tenu par le 1er bataillon thaï et violemment attaqué par la division 308 dans le cadre de l'offensive de Giap en pays thai, rendait inutile l'opération aéroportée du 6° BPC sur Tulé. Le contre ordre étant arrivé trop tard au général de Linarès, il ne restait plus qu'à recueillir les rescapés des postes avosinnant dont Gia Hoï... et à se replier vers la rivière noire.




3 - Les véhicules :

Parmi les véhicules exposés on remarque cet half-track pris par le Vietminh le 24 juin 1954, lors de la destruction du GM 100 dans la région d'An-khê :





Cet half-track était équipé d'une mitrailleuse légère sur chacun des côtés du véhicule ainsi que d'une mitrailleuse lourde 12,7 servie à partir du poste de pilotage de l'engin :



Observations particulières :

Ce transport de troupe dont le modèle de base a été élaboré en 1935 a servi tout au long de la seconde guerre mondiale et est resté en service en France jusqu'aux années 80 dans certaines unités.
D'un poids d'environ 5.500 kg, servi par un équipage de 3 hommes il pouvait transporter un groupe de combat de 10 hommes et pouvait atteindre une vitesse de 70 km/h avec une autonomie de 300 km.


En poursuivant la visite du côté sud du musée d'histoire militaire, le long de l'emprise comprise entre l'ancien stade Mangin et la route, on peut voir un certain nombre d'autres matériels que je ne détaillerai pas car ils sont postérieurs à la première guerre d'Indochine mais sont soit d'origine américaine pour un camp soit d'origine soviétique pour l'autre :









4 - Les avions :

Parmi les débris d'avion ramenés depuis les champs de bataille jusqu'au musée on trouve un certain nombre de pièces provenant d'appareils abattus au dessus de Dien Bien Phû comme ce moteur de chasseur bombardier Hellcat :


Observations particulières :
Le Grumann Hellcat a été mis en service en Indochine pour remplacer les "Spitfire" et les "King cobra" à bout de souffle 
Sur les 12.275 appareils fabriqués aux Etats Unis entre 1942 et 1945, 40 d'entre eux ont été livrés à l'armée de l'air française en Indochine en octobre 1950 après avoir été acheminés par le porte-avion Dixmude.
Par la suite les Hellcat de l'armée de l'Air furent remplacés dès 1951 par des Bearcat.



Même si les Vietnamiens exposent quelques chasseurs Mig de fabrication soviétique ainsi qu'un avion ayant été donné au président Ho Chi Minh pour ses déplacements après 1954, tout autour du musée d'histoire militaire on peut observer un grand nombre d'aéronefs capturés en avril 1975 soit lors de la chute de Saigon soit dans les anciennes bases de l'armée sud-vietnamienne : hélicoptères, chasseurs, avions d'observation :








La plupart des aéronefs ont le marquage sud-vietnamien ou américain :





5 - Les vitrines du musée :

A l'intérieur des bâtiments du musée, une première partie des expositions est consacrée à la lutte de libération contre les "colonialistes français". On y trouve de nombreuses armes et équipements ayant été utilisées par les miliciens communistes, que ce soit des armes de fabrication artisanale ou que ce soit des armes livrées par la Chine, ainsi que de nombreuses photos rappelant cette lutte...

Parmi les objets exposés pour rappeler l'oppression française, les Vietnamiens ont placé une guillotine... une seconde ayant aussi été laissée pour faire bon poids à la prison centrale Hoa Lo  :




Parmi les vitrines du musée d'histoire militaire j'ai toutefois eu un coup de cœur particulier pour celle-ci qui présente des insignes, des galons, des barètes de décorations récupérées à Dien Bien Phu après la bataille par les troupes du Vietminh. Ayant porté pendant ma carrière les mêmes épaulettes à ancre d'or de la coloniale, comme lieutenant puis capitaine, que celles figurant dans cette vitrine, je ne pouvais qu'être interpellé par ces "prises de guerre" dont j'aimerais connaître les propriétaires... Peut être y a t-il dans le lot celles du lieutenant Le Vigouroux du 6° BPC ou celles du capitaine Pichelin du 8° BCCP... à moins que ce ne soient celles du lieutenant Brunbrouck de l'artillerie coloniale... tombés pendant la bataille...
Pour la petite histoire, outre ceux des unités bien connues (6° BPC, 13° DBLE, 1er RPC,..), on notera aussi la présence d'un insigne de la gendarmerie prévôtale porté par l'un des six gendarmes présents à Dien Bien Phû :



La bataille de Dien Bien Phû fait l'objet d'une maquette, d'un film et de nombreux tableaux mais l'ensemble est vieillissant et assez peu pédagogique...



Les vitrines consacrées à Dien Bien Phû renferment divers objets et de nombreuses photographies avec des légendes dont la traduction en anglais ou en français est assez fantaisiste.... :


Parmi les objets exposés on remarque les célèbres bicyclettes qui sont censées avoir ravitaillé les troupes vietnamiennes pendant leur siège de Dien Bien Phû.


Une seconde partie du musée, moins intéressante pour nous autres Français et surtout moins riche au regard de ce qui est exposé dans les musées de Saigon, est consacrée à la guerre de libération menée contre les "impérialistes américains"... et les fantoches du régime de Saïgon. On peut y voir un des chars ayant défoncé les grilles du palais présidentiel le 30 avril 1975 :





Nota :
Le musée d'histoire militaire est ouvert tous les jours excepté les dimanche et lundi, de 8h00 à 11h30 et de 13h à 16h30.
L'entrée est payante (40.000 VND) soit environ un euro et demi.
Pour ceux qui veulent voir d'autres photos du musée je recommande le site suivant :
https://www.tripadvisor.fr/ShowUserReviews-g293924-d455005-r136278628-Vietnam_Military_History_Museum-Hanoi.html

Bonne visite !

1 commentaire: