A l'issue de la visite du quartier de la citadelle, il est temps d'entamer la découverte de l'ancien quartier français.
L'ancien quartier français de Hanoï, groupé autour du Petit Lac, peut globalement se découper en trois zones que nous allons parcourir d'Est en Ouest, à savoir :
- en bleu, le secteur de l'ancienne concession française située en bordure du Fleuve Rouge ;
- en rouge, l'ex rue Paul Bert avec l'ensemble des bâtiments publics édifiés au nord de celle-ci ;
- en vert, le quartier de la cathédrale qui s'étend à l'ouest du Petit Lac
Pour faciliter cette découverte du Hanoï colonial on pourra reporter le plan d'époque sur le plan de la ville actuelle ci-dessous :
En 1874 la France ayant obtenu une concession de terrains pour l'installation de son consul et de l'escorte de celui-ci, ce secteur de Hanoï devint jusqu'en 1883, le seul lieu de résidence autorisé des Européens sur le fleuve Rouge.
Voici la description qu'en donne le docteur Edmond Courtois dans son livre " Le Tonkin français contemporain" - Lavauzelle, 1891 :
" Avant 1882 nous possédions à Hanoï une concession devenue notre propriété par le traité de 1874. elle n'occupait pas plus de 300 mètres de longueur et était limitée d'un côté par le fleuve Rouge, de l'autre par une haie formée de solides pieux, véritable palanque crénelée, et était traversée par une rue unique ; c'est là qu'aujourd'hui encore se trouve l'hôtel du résident général, l'ancien hôpital, l'hôtel du général en chef, puis les principaux services (intendance, service de santé, Trésor, etc.). C'était le quartier officiel français par excellence en 1885-86. Actuellement, la clôture n'ayant plus raison d'être a été détruite et les Français sont disséminés un peu partout dans la ville, surtout aux abords du petit lac. Je me rappellerai toujours les heures mélancoliques que j'ai passées là, dans cette concession française, au mois d'août 1885. Dans un repli de terrain protégé par un coin de la concession et par la grande digue qui arrête les eaux du fleuve Rouge, se trouvait l'ancien cimetière européen ; c'était alors un enclos entouré d'un mur en briques découpées à jour à la mode chinoise. j'y ai fait mes premières visites à mon arrivée au Tonkin et je n'oublierai jamais ce petit coin de terre grasse envahi par les herbes où dorment tant des nôtres. La plus ancienne tombe que j'y ai remarquée datait de 1874 et recouvrait les restes d'un soldat du génie. Depuis notre arrivée au Tonkin, ce cimetière était devenu trop petit et débordait déjà en 1885 jusque sur le chemin de ronde de la concession; Aujourd'hui, le cimetière français a té transféré plus loin, près du grand lac, en face de la pagode du Grand-Bouddha et près d'un angle de la citadelle. c'est là que reposent déjà tant des nôtres entre un fossé profond et un chemin,, dans un terrain rougeâtre sous un ciel chauffé à blanc avec l'éternelle chanson des crapauds qui peuplent les mares environnantes.
La concession française de Hanoï avait son existence à tout instant compromise par les crues du fleuve Rouge et chaque jour diminuait d'étendue en raison des affouillements du sol par les eaux du fleuve. En une seule année (1885), la rive a été rongée sur une profondeur de 40 mètres et il y avait en août 1885 un tel remous et un tel courant que les canonnières en station devant la concession étaient obligées, pour se tenir à l'ancre, d'actionner leurs machines et de marcher jour et nuit contre le courant. En 1884, à quelques kilomètres de là, le courant avait détruit une digue et noyé plus de 800 personnes."
Les photos ci-dessous montrent l'aspect général de la rue de la Concession, autrefois et aujourd'hui :
Voici la description qu'en donne le docteur Edmond Courtois dans son livre " Le Tonkin français contemporain" - Lavauzelle, 1891 :
" Avant 1882 nous possédions à Hanoï une concession devenue notre propriété par le traité de 1874. elle n'occupait pas plus de 300 mètres de longueur et était limitée d'un côté par le fleuve Rouge, de l'autre par une haie formée de solides pieux, véritable palanque crénelée, et était traversée par une rue unique ; c'est là qu'aujourd'hui encore se trouve l'hôtel du résident général, l'ancien hôpital, l'hôtel du général en chef, puis les principaux services (intendance, service de santé, Trésor, etc.). C'était le quartier officiel français par excellence en 1885-86. Actuellement, la clôture n'ayant plus raison d'être a été détruite et les Français sont disséminés un peu partout dans la ville, surtout aux abords du petit lac. Je me rappellerai toujours les heures mélancoliques que j'ai passées là, dans cette concession française, au mois d'août 1885. Dans un repli de terrain protégé par un coin de la concession et par la grande digue qui arrête les eaux du fleuve Rouge, se trouvait l'ancien cimetière européen ; c'était alors un enclos entouré d'un mur en briques découpées à jour à la mode chinoise. j'y ai fait mes premières visites à mon arrivée au Tonkin et je n'oublierai jamais ce petit coin de terre grasse envahi par les herbes où dorment tant des nôtres. La plus ancienne tombe que j'y ai remarquée datait de 1874 et recouvrait les restes d'un soldat du génie. Depuis notre arrivée au Tonkin, ce cimetière était devenu trop petit et débordait déjà en 1885 jusque sur le chemin de ronde de la concession; Aujourd'hui, le cimetière français a té transféré plus loin, près du grand lac, en face de la pagode du Grand-Bouddha et près d'un angle de la citadelle. c'est là que reposent déjà tant des nôtres entre un fossé profond et un chemin,, dans un terrain rougeâtre sous un ciel chauffé à blanc avec l'éternelle chanson des crapauds qui peuplent les mares environnantes.
La concession française de Hanoï avait son existence à tout instant compromise par les crues du fleuve Rouge et chaque jour diminuait d'étendue en raison des affouillements du sol par les eaux du fleuve. En une seule année (1885), la rive a été rongée sur une profondeur de 40 mètres et il y avait en août 1885 un tel remous et un tel courant que les canonnières en station devant la concession étaient obligées, pour se tenir à l'ancre, d'actionner leurs machines et de marcher jour et nuit contre le courant. En 1884, à quelques kilomètres de là, le courant avait détruit une digue et noyé plus de 800 personnes."
Les photos ci-dessous montrent l'aspect général de la rue de la Concession, autrefois et aujourd'hui :
L'ex rue de la Concession aujourd'hui, fermée à son extrémité sud
par une emprise militaire vietnamienne
Si l'on se fie aux descriptions d'époque on trouvait donc dans cette rue :
- l'Hôtel du directeur général des Douanes, et en arrière les services de la direction des Douanes et Régies du Tonkin ;
- l'Hôtel du directeur général des Douanes, et en arrière les services de la direction des Douanes et Régies du Tonkin ;
- l'ancien Consulat dont les bâtiments furent augmentés pour servir de demeure aux Résidents et Gouverneurs généraux ;
- l'Hôtel du Général en Chef, à l'emplacement de l'ancien logis des officiers à l'époque du Consulat ;
- l'Hôtel du Général en Chef, à l'emplacement de l'ancien logis des officiers à l'époque du Consulat ;
- le service géographique avec ses ateliers de dessin, de photographie, d'impression ;
- les services de l'Etat-Major du corps de l'Indochine, où était l'ancien pavillon de l'escorte consulaire, - le Château d'eau, élevé sur l'ancien cimetière de la Concession avec un monument en granit rappelant que dans la première nécropole de Hà-nôi avaient été inhumés les restes de Berthe de Vilers et de ceux qui firent partie de la garde du consul.
Voici les photos d'une partie de l'ancienne emprise militaire, hier et aujourd'hui :
Voici les photos d'une partie de l'ancienne emprise militaire, hier et aujourd'hui :
L'état-major du général Verdier en janvier 1936 rue de la Concession
L'emplacement de l'ancien état-major aujourd'hui
On observera que les dates 1886-87 figurant sur la photo de l'état-major du général Verdier sont encore visibles sur le fronton de l'édifice :
NB : pour ceux qui souhaitent se loger sur Hanoï à proximité du Petit lac et de l'Opéra, mais dans un quartier plus calme que les "Trente six guildes", il est possible de réserver à l'hôtel de l'armée vietnamienne qui accueille aussi les touristes étrangers. Cet hôtel avec piscine est situé dans la zone où s'élevaient autrefois une partie des services de l'état-major, zone qui est en cours de rénovation :
Pour plus d'informations voir http://www.booking.com/hotel/vn/army-guest-house.fr.html
Army guest house de Hanoï
A l'extrémité de la rue de la Concession on trouvait enfin l'Hôpital militaire, construit en 1892-93 sous le gouverneur général de Lanessan. Cet édifice pouvait contenir 400 malades.
Voici la physionomie générale de l'hôpital Lanessan autrefois :
L'ancien hôpital Lanessan est aujourd'hui constitué par un ensemble de bâtiments récents et anciens qui ne ressemble plus trop à l'hôpital des années cinquante :
Alors qu'autrefois on pouvait circuler librement le long de cet axe, il est aujourd'hui impossible d'emprunter l'ex rue de la concession pour gagner la zone hospitalière située au sud de l'ancienne emprise française car celle-ci aboutit à son extrémité sud à une implantation militaire :
Pour découvrir les quartiers situés au sud de l'ex rue de la Concession devenue aujourd'hui Phạm Ngũ Lão, il faut contourner la zone en empruntant l'ancien boulevard Bobillot devenu aujourd'hui Lê Thánh Tông.
On passe dans un premier temps à hauteur de l'ancienne faculté de médecine :
En poursuivant cette avenue on arrive ensuite au niveau de l'ancien institut Pasteur qui fut entièrement ravagé lors de l'insurrection du 19 décembre 1946 :
http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu00063/les-debuts-de-la-guerre-d-indochine-hanoi-en-decembre-1946.html
" Inauguré en 1894 par De Lanessan, gouverneur général de l’Indochine et ancien médecin de marine, l’hôpital de Hanoi présente à l’origine 450 lits. Sa capacité passe rapidement à 500 lits. Il prend le nom de Lanessan en 1928 et devient l’hôpital d’Indochine possédant le plus important plateau technique. A la création de l’école puis de la faculté de médecine, il assure le support clinique de l’enseignement.
Au cours de la guerre d’Indochine, il est un important centre chirurgical de traitement des blessés français et vietnamiens. Sa capacité atteint alors 1500 lits. En 1954, à la suite des accords de Genève, il est fermé."
Source : http://www.asnom.org/oh/fr/0740_hopitaux_coloniaux.php
" L'ancien "Hôpital Lanessan" devenu d'abord "Hôpital 303" puis "Hôpital de la Croix Rouge Soviétique", compte environ 1,500 lits. Dans le temps, cet hôpital exclusivement réservé aux militaires et fonctionnaires français, n'admit jamais de Vietnamiens; dès l'installation du nouveau régime au Nord Viêt-Nam, il fut transformé en hôpital militaire pour les grands blessés de Diên Biên Phu, seuls 2 pavillons étaient réservés aux civils de choix c'est-à-dire aux fonctionnaires du régime, aux membres du corps diplomatique et aux techniciens des "peuples amis"... A "Lanessan", des travaux de réfection commencèrent, bien que les bâtiments aient été laissés en parfait état, mais il fallait prouver que l'on faisait mieux que les colonialistes : quelques cloisons furent abattues et d'autres élevées, puis l'ensemble fut repeint. L'armée française ayant en vertu des Accords de Genève replié tout son matériel, on dota l'hôpital de salles d'opération dignes de ce nom, d'installations de radiographie, de rayons X, de diathermie, et on remeubla chambres et salles, les garnissant d'appareils de T.S.F., afin que les malades continuent à jouir des "bienfaits" de la propagande. Une bibliothèque marxiste-léniniste ne fut pas oubliée; la pharmacie, la stérilisation, les salles de pansements, la blanchisserie et la cuisine furent de même réaménagées. Puis l'"Hôpital 303" commença à fonctionner avec un imposant personnel soviétique de 120 personnes, qui devait guider et conseiller les "camarades" vietnamiens... Quand on jugea les Vietnamiens capables de faire marcher l'hôpital, une cérémonie solennelle fut organisée, au cours de laquelle il fut déclaré que la Croix Rouge Soviétique faisait don d'un hôpital portant son nom au peuple vietnamien : supercherie, qui ne trompe que ceux qui ne sont pas renseignés. Les techniciens reprirent les uns après les autres la route de Moscou, et seule la doctoresse resta avec un électricien. Tandis que l'"Hôpital de la Croix Rouge Soviétique" est destiné exclusivement aux habitués du "Kremlin vietnamien", son ancienne annexe, le nouveau "303" fonctionne uniquement pour les can-bô assez importants. C'est ainsi que les tenants du "pouvoir du peuple" - à l'image des pires colonialistes - songent d'abord à leur propre santé avant de se soucier de la "santé publique".
Source : http://hanoi.not.free.fr/hopital_militaire_108.htm
Voici la physionomie générale de l'hôpital Lanessan autrefois :
Alors qu'autrefois on pouvait circuler librement le long de cet axe, il est aujourd'hui impossible d'emprunter l'ex rue de la concession pour gagner la zone hospitalière située au sud de l'ancienne emprise française car celle-ci aboutit à son extrémité sud à une implantation militaire :
Les accès sud de la rue de la Concession autrefois
Les accès sud de la rue de la Concession aujourd'hui
On passe dans un premier temps à hauteur de l'ancienne faculté de médecine :
C'est dans cette ancienne Faculté de médecine qu'étudiaient dans les années cinquante une centaine de jeunes provenant de nos possessions asiatiques : après quatre années d'études, ils passaient un examen pour l'obtention du brevet les admettant dans le cadre des médecins indigènes. C'est là qu'enseignait notamment le professeur Huard, ce médecin qui grâce aux contacts qu'il avait maintenu avec des anciens élèves ayant rejoint le camp du Vietminh intercéda en 1950 puis en 1954 pour obtenir la libération des prisonniers blessés sur la RC4 (dont le lieutenant Faulques) puis à Dien Bien Phû.
En poursuivant cette avenue on arrive ensuite au niveau de l'ancien institut Pasteur qui fut entièrement ravagé lors de l'insurrection du 19 décembre 1946 :
http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu00063/les-debuts-de-la-guerre-d-indochine-hanoi-en-decembre-1946.html
Parmi les noms consacrés au Vietnam il y a outre Pasteur, celui de Yersin en raison de ses travaux pour l'éradication du virus de la peste, et dont le buste orne encore le jardin situé en face de l'institut Pasteur :
Pour terminer la visite du secteur Est de l'ancien quartier français, précisons enfin qu'il existait autrefois au sud de l'institut Pasteur un cimetière qui a aujourd'hui disparu.
Merci pour votre travail. Cela m'a permis de retrouver des sites habités par mes parents avec vos anciennes cartes.
RépondreSupprimerTon beau site m'a ému. Bien qu'étant brésilien, j'étudie la "guerre française d'Indochine" et j'étais à Hanoi pour ses occasions hébergées dans un hôtel de la rue Paul Bert. Je suis allé deux fois au Dien Bien aujourd'hui un joyeux chaos. Je suis passé par Hanoi dans tous les lieux importants liés à la guerre. À l'endroit voisin de Petit Lac, où les autorités ont assisté aux défilés de la milice, j'ai superposé une photo du général de Lattre et, pendant un moment, une fanfare militaire m'a fait revenir dans le temps. Je me suis disputé avec un ancien combattant américain. Lorsqu’il a parlé de la défaite française à Dien Bien, j’ai dit que c’est entre-temps que vous vous êtes enfui en 1973 sur le toit de l’ambassade américaine à Saigon. Déjà en 1955, les dernières unités françaises ont défilé à Hanoi et elles ont hissé leurs bannières jusqu'à leur retrait définitif et dans l'ordre.
RépondreSupprimerDe nombreux bâtiments sont maltraités mais d'autres sont soigneusement préservés.
Bonjour,
RépondreSupprimerSavez vous si il est possible de retrouver les noms des soldats français inhumés à Hanoï à la fin du 19 ème siècle ?
Cordialement.
bonjour, je suis à la recherche d'un édifice du patrimoine de Hanoi construit il y a si longtemps, aucune trace nulle part Military Guest House construite en 1874 je vous communique son nom car il ne s'agissait peut être pas de sa vraie vocation à cette période.Peut être que vos archives détiennent ce document ou que vous savez s'il n'a pas résisté à l'usure du temps et des hommes..
RépondreSupprimerMerci
Savez vous s il y avait une maternité ? Mon père est né en 1941 d une mère vietnamienne mais sûrement d un père français . Je cherche à en savoir plus . Merci
RépondreSupprimerHélas, non je ne sais pas...
SupprimerMon père était médecin chef de Lanessan et nous habitions 7 rue Chéon de 1946 à 1951.Pouvez vous m'aider à retrouver le nouveau nom de la rue.Cela me permettrait de redécouvrir mes souvenirs d'enfance.Merci à vous
RépondreSupprimer