samedi 10 mai 2014

Dong Khé : la citadelle... (2)

          Après avoir parcouru la bourgade de Dong Khê et l'ancien quartier Dubouchet, il est à présent temps de nous intéresser à cette citadelle qui a subi l'attaque du Vietminh à deux reprises...

La garnison de Dong Khê a en effet été attaquée et conquise à deux reprises par le Vietminh : une première fois en mai 1950 et une seconde en septembre 1950.
Si la première attaque a été suivie d'une contre attaque française qui a permis avec le largage du 3° BCCP du commandant Decorse le 28 mai 1950 sur la piste d'aviation de réoccuper la position, la seconde attaque en revanche n'a pas donné lieu à une reconquête et Dong khê n'est plus française depuis le 18 septembre 1950...
De l'ancienne citadelle, il ne reste malheureusement pas grand chose de très authentique aujourd'hui car les Vietnamiens ont "réhabilité" celle-ci à leur façon en y bâtissant des constructions récentes (cf. image ci-dessous) et en y ouvrant un cimetiere militaire sur le glacis nord. Il est probable que les combats lors de la guerre sino-vietnamienne de 1979 ont fini par achever ce que les affrontements de 1950 et le temps avaient laissé d'intact...

Un blockhaus de construction récente...
(Photo JLM)


 Schéma au 1/1000 de l'ancienne citadelle
© Indo Editions - "Les combats de la RC4"
(Photo collection Dutrône)


On peut accéder de deux façons à la citadelle : soit en gravissant l'escalier qui la relie au marché, soit en empruntant la rampe qui partant au niveau de l'ancien cimetière devenu collège (bâtiments extérieurs aux toits de couleur rouge), longe le mouvement de terrain à flanc de coteau.
Si la grille est fermée, ce qui est généralement le cas, on peut toujours faire comme Antoine et se faufiler à travers les barreaux :

 La grille d'accès à la rampe conduisant à l'ancienne entrée principale
(Photo JLM)


La rampe bétonnée qui permet de monter à la citadelle était autrefois le chemin qui menait à la porte d'entrée principale (voir billet précédent) :

 La rampe d'accès à l'ancienne porte principale
(Photo JLM)


La porte d'entrée devant laquelle posaient autrefois en tenue blanche les cadres de la garnison a depuis longtemps disparu tout comme le mur d'enceinte bâti contre les incursions des Pavillons noirs d'autrefois ; il ne subsiste juste de l'enceinte qu'un réseau de fil de fer barbelés en mauvais état :

L'emplacement de l'ancienne porte principale 
(Photo JLM)


Si les bâtiments d'autrefois ont aujourd'hui disparu, on trouve néanmoins un certain nombre de dalles de ciment qui devaient probablement servir de sous bassements à ces bâtiments :


Quelques une des dalles sur lesquelles s'élevaient les bâtiments de la citadelle...
(Photos JLM)


Sur les lisières Est de la citadelle on trouve d'anciennes positions d'artillerie, de toute évidence reconstituées et qui ressemblent à des emplacement de mortiers lourds... Il est toutefois possible qu'il s'agisse là à l'origine de l'emplacement où était installé le canon de 57 mm des légionnaires lors de la seconde attaque contre Dong Khê car à partir de cette position on peut battre les abords de la citadelle en direction de la route de Ta Lung :

Alvéoles d'anciennes positions d'artillerie 
(Photo JLM)


L'abri ci-dessous est aussi situé du côté Est de la citadelle ; c'est en fait le seul emplacement de combat qui semble relativement authentique :

 Abri enterré
(Photo JLM)


Si l'on s'avance sur les pourtours de la zone "bâtie", notamment sur l'ancien glacis en direction du Nord-Est, aujourd'hui recouvert d'un grand nombre d'arbres qui n'existaient pas à l'époque, on s'aperçoit que le sol est pas mal bouleversé... Il est probable que ce sont là des "entonnoirs" d'obus laissés par les différents bombardements qu'a subi la position, sachant que l'essentiel de l'attaque ainsi qu'on le verra ultérieurement, a porté sur les flancs Nord et Est de la citadelle :

Le sous-bois du glacis entourant l'ancienne citadelle
(Photo JLM)


Dans ses mémoires, le lieutenant Jaubert fait référence à la popote de Dong Khê dans laquelle lui même et ses camarades "faisaient des cartons" au pistolet sur des boites de conserve pour s'amuser...
Les photos ci-dessous le montrent en compagnie de ses camarades devant cette popote au début de 1950 avec de la gauche vers la droite : Lnt BRONDEL (Off. Rens.), Lnt JAUBERT (4ème Cie), Médecin Capitaine, Lnt LAFFONT (4ème Cie), Cne CASANOVA, Lnt de VALS (partisans), Lnt ASSID (3ème Cie) :

Les officiers du 8 RTM début 1950
(Photo Réf. http://jaubert.chez.com/indchine.htm)


Les deux photos ci-dessous nous permettent de voir l'état du bâtiment en 1950 et ce qu'est devenu son emplacement aujourd'hui :

Vue générale de la popote du 8° RTM début 1950
© Indo Editions - "Les combats de la RC4"
(Photo Collection Dutrône)


L'emplacement de l'ancienne popote aujourd'hui 
(Photo JLM)


Bernard quelque peu dubitatif devant les restes d'une volée de marches 
(Photo JLM)


Lorsqu'on parcourt cette zone de la citadelle, on ne peut manquer d'avoir une pensée émue pour ces anciens qui ont vécu là, y ont chahuté pour combattre l'ennui... avant d'y perdre la vie lors des attaques de mai et septembre 1950... Ainsi que je l'ai rappelé précédemment, les tués des combats de mai 1950 ont été enterrés dans un premier temps dans le cimetière entre la citadelle et le piton Montmartre avant d'être définitivement rapatriés en France au début des années 80, lors du regroupement des corps à Fréjus... Ceux de septembre ont probablement été incinérés ou inhumés là où ils étaient tombés comme ce fut le cas de la plupart des soldats tués pendant la bataille de la frontière de Chine... 


En poursuivant vers le sud de l'ancienne citadelle, on traverse une sorte de place d'armes sur laquelle ont été bâtis un blockhaus et un bâtiment servant occasionnellement de musée mais vide lors de notre passage:

Partie sud de la citadelle
(Photo JLM)


Les deux photo ci-dessous montrent des débris épars des fortifications et des bâtiments des années 50... Comme l'a souligné le lieutenant Jaubert dans ses mémoires, les murs étaient faits de pierres scellées par de la chaux et ils offraient de ce fait beaucoup moins de résistance que du béton... Sous les coups direct de l'artillerie adverse positionnée sur les hauteurs environnantes, ces fortifications furent en toute logique assez rapidement détruites :

 Vestige de murs...
(Photo JLM)


Débris de maçonnerie
(Photo JLM)


Un réseau de barbelés et d'obstacles entourant le périmètre de la citadelle avait remplacé l'ancien mur d'enceinte du début du siècle mais en dépit de la forte pente du terrain cela ne permit pas d'interdire l'assaut du Vietminh que ce soit en mai puis par la suite en septembre 1950.
Rien ne permet toutefois d'affirmer avec certitude que les vestiges de barbelés et les poteaux que l'on retrouve tout autour de la citadelle datent des années cinquante :

Le réseau de barbelés de l'enceinte
(Photo JLM)


 
 Gros plan sur un barbelé apparemment  trop neuf pour être d'époque... 
(Photo JLM)


 Détail de poteau
(Photo JLM)


Dans la partie nord de la citadelle, au niveau de ce qui était autrefois un glacis, a été implanté un cimetière vietnamien. Les différents noms gravés sur la pierre ne faisant pas tous référence à 1950 mais à différentes dates postérieures (cf. 1975, 1979...), tout donne à penser qu'il s'agit d'un monument aux morts, soit originaires de la région, soit tombés dans le secteur :

Entrée du cimetière vietnamien de la citadelle
(Photo JLM)


 Intérieur du cimetière vietnamien
(Photo JLM)


Zone arrière du cimetière vietnamien
(Photo JLM)


Une longue liste de morts tombés depuis 1950...
(Photo JLM)


Des sépultures civiles... contre le mur du cimetière militaire vietnamien
(Photo JLM)


Pour terminer cette visite voici à présent deux photos d'ensemble de la citadelle :
- la première est une vue aérienne prise depuis le nord : on y aperçoit distinctement au premier plan l'ancien cimetière français puis au dessus la position fortifiée entourée d'un réseau de barbelés, la rampe d'accès principale, le cheminement reliant la citadelle au quartier Dubouchet ;
- la seconde est une vue Google Earth verticale : elle montre l'ancienne citadelle aujourd'hui et répertorie les différents points présentés précedemment.


Vue aérienne de la citadelle de Dong Khê en septembre 1949
© Indo Editions - "Les combats de la RC4"
(Extrait de Photo aérienne)
Vue actuelle de l'ancienne citadelle de Dong Khê
(Photo Google Earth)


 Fin de la visite pour Bernard, Antoine et moi...
(Photo JLM)


La visite de la citadelle étant achevée, intéressons nous à présent à ce que furent les combats de mai et de septembre 1950 qui y furent livrés...





















Dong Khê : un poste en zone frontière... (1)

          Après ce parcours chargé d'histoire et de sang que nous venons d'effectuer, je vous propose de visiter en détail la petite bourgade de Dong Khê qui parfois est aussi appelée Na Loung car là comme ailleurs, de nouveaux noms ont été donnés... qui cohabitent quand même avec les anciens...


Pour commencer cette visite, nous pouvons essayer de voir à quoi ressemblait Dong Khê à l'époque où le colonel Gallieni était en poste au Tonkin, c'est à dire entre 1892 et 1896.
Sur la photo ci-dessous, un schéma du poste de Dong Khê, apparemment dessiné par le colonel Galliéni montre que la bourgade du début du siècle était essentiellement organisée autour du poste bâti sur un éperon rocheux et à l'intersection des routes menant en direction de la frontière chinoise vers l'Est, de Cao Bang vers le nord ouest et de That Khê vers le sud.
Le mouvement de terrain qui est représenté au nord du poste (courbes de niveau circulaires) est la position que les Français appelleront plus tard "Montmartre" et sur lequel ils installeront un poste de section.
En contrebas du fort, c'est au niveau du marché de Dong Khê que seront édifiés par la suite les bâtiments du quartier Dubouchet dont certains sont encore visibles aujourd'hui.

Photo collection Gallieni


La photo ci-dessous montre la porte principale de l'entrée de la citadelle avec les cadres de la garnison posant en grande tenue pour une photo de groupe :

Photo X
- Collection Deroo -


La photo ci-dessous, probablement prise depuis le mouvement de terrain nord (piton Montmartre) montre la physionomie générale du poste au début du XX° siècle : ce dernier était entouré d'une enceinte fermée et on devine à gauche de l'axe principal séparant le poste du marché, la rampe qui monte à la citadelle et donne accès à la porte principale. En fond de tableau on aperçoit les lacets de la Rc 4 qui contournant les pitons sud se dirige vers le Na Kêo et le col de Loung Phaï.

Photo X
- Collection Decorse -

La photo ci-dessous, beaucoup plus récente puisqu'elle date de septembre 1949, fait apparaître de nombreuses évolutions par rapport au début du siècle.
On constate tout d'abord que l'ancien mur d'enceinte a disparu, que l'emplacement du marché s'est étendu et a été bâti, qu'une piste d'aviation pouvant accueillir les avions légers Morane a été tracée à l'ouest du village... et qu'un cimetière a été ouvert entre la citadelle et le piton Montmartre. Ce cimetière qui accueillait à l'époque les sépultures de nos soldats (parmi lesquels citons le capitaine Casanova commandant de la place de Dong Khê qui après avoir trouvé la mort pendant l'attaque de mai 1950 y fut inhumé avec d'autres par le lieutenant Jaubert), a été vidé il y a quelques années. Les corps ont a priori été rapatriés sur la nécropole de Fréjus et une école a été bâtie au même emplacement. 

Photo aérienne
- Collection Indo Editions -


En mai 1950, à l'époque où le lieutenant Jaubert du 8° RTM (Régiment de tirailleurs marocains) vint tenir garnison à Dong Khê, la place s'organisait de la façon suivante :

Le dispositif de défense d'ensemble en mai 1950
Photo aérienne
- Collection Indo Editions-

Le détail des différents bâtiments nous est fourni sur un croquis du Lt Brondel qui servait dans les rangs de la 4° compagnie :


Une photo aérienne prise à peu près à la même époque depuis l'ouest du village montre un certain nombre d'éléments intéressants... En fond de tableau on voit un mouvement de terrain central avec une échancrure au centre qui sera utilisée par la suite par le vietminh pour y installer deux canons qui tireront en tir tendu sur la citadelle lors de l'attaque de mai 1950... A flanc de pente du mouvement de terrain sur lequel est bâti la citadelle on aperçoit un sentier d'accès reliant celle ci au quartier Dubouchet situé en contrebas : ce sentier qui existe toujours aboutit à l'angle de l'échoppe de notre ami et guide germanophile Lam et a été "durci" puisque c'est aujourd'hui un escalier cimenté :

Dong Khê en 1950
Photo collection Decorse


Sur la photo ci-dessous on voir l'aspect actuel du sentier qui reliait la citadelle au quartier Dubouchet... La construction qu'on aperçoit à droite (et qui est aujourd'hui un lieu d'aisance) ressemble étrangement à une ancienne guérite permettant de contrôler l'accès entre les deux sites :

L'escalier reliant la citadelle au quartier Dubouchet
(Photo JLM)


Sur cette vue Google Earth ainsi que sur les photos ci-dessous, on peut voir à présent la physionomie générale de cette bourgade :

Photo google Earth

 Les entrées Sud de Dong Khê
Photo JLM


 Les entrées Est de Dong Khê
Photo JLM

Les abords Est de la citadelle et la route circulaire
Photo JLM

Sans doute la plus belle maison de Dong Khê...
Photo JLM


Les photos ci-dessous montrent la zone du marché de Dong Khê... anciennement quartier Dubouchet. Un certain nombre de bâtiments, du fait de leur architecture ressemblent au type de bâtiments construits à l'époque pour héberger nos soldats ou pour servir de bureaux, d'ateliers... Il est donc probable qu'il s'agit là des anciens bâtiments occupés par le personnel qui n'était pas installé dans l'enceinte de la citadelle :

 L'ancien quartier Dubouchet
Photo JLM

 Photo JLM

Photo JLM

Photo JLM

Photo JLM


Parmi ces bâtiments, l'un d'entre eux qui se situe presque aux sorties Ouest du village a retenu particulièrement notre attention car son architecture et sa décoration typiquement chinoise semblaient indiquer une ancienneté certaine... Sur un des schémas que j'ai eu l'occasion de consulter (mais dont je ne trouve plus trace malheureusement...) cette maison est répertoriée de mémoire comme une "maison de repos" (et non une infirmerie...). De là à en déduire qu'il s'agissait de la maison de tolérance de la garnison, il n'y a qu'un pas à franchir, d'autant que les unités de Tabors, de Tirailleurs nord africains, de légionnaires... avaient pour habitude (lorsque le contexte le permettait) de disposer à demeure d'un "pouf"... Il se pourrait toutefois que ce soit tout simplement l'ancienne maison de jeux tenue par les inévitables Chinois car le lieutenant Jaubert mentionne cette dernière dans ses mémoires...
Quel que puisse être le passé de cette maison aujourd'hui délabrée, dont la façade est constellé d'éclats sans que l'on puisse affirmer avec certitude si ceux ci datent des combats de 1950 ou de 1979, ce bâtiment est aujourd'hui devenu une menuiserie :

 Un vestige du passé...
Photo JLM

Détail de la façade
Photo JLM

Intérieur de la maison 
Photo JLM

Les traces des combats du passé 
Photo JLM

En continuant vers les sorties ouest de Dong Khê on aboutit à un ruisseau le long duquel avait été tracé à l'époque une piste d'aviation susceptible d'accueillir les avions légers type Morane... Le colonel Constant à qui on a maintes fois reproché de ne pas aller sur le terrain s'est néanmoins rendu à Dong Khê par ce biais entre les deux attaques. La zone de l'aérodrome servit aussi de DZ lors de l'opération aéroportée de reconquête de la citadelle le 27 mai 1950 par le 3° BCCP aux ordres du chef de bataillon Decorse. Aujourd'hui il est toutefois impossible de retrouver la trace de la piste car l'ensemble de la zone est recouverte de jardins :

La zone de l'ancien aérodrome
Photo JLM

 Antoine et Bernard en attente d'un passage Morane... à basse altitude
Photo JLM

La vie des unités qui séjournaient à tour de rôle au poste de Dong Khê nous a été relatée par le lieutenant Jaubert dans ses mémoires :
" Dong Khê est une bourgade à une dizaine de kilomètres de la Chine, au carrefour d’une route y conduisant avec la RC4 qui, elle, longe la frontière. Il y a bien une citadelle de l’époque coloniale, moins imposante qu’à Cao Bang, mais bien utile. Nous sommes tout de même dans une cuvette, entourée de calcaires menaçants où il y aura juste assez la place d’installer une petite piste d'atterrissage pour le Morane d’évacuation, des blessés (mais aussi du courrier, car si nous le recevons assez rapidement grâce aux parachutages, le courrier au départ est plus aléatoire...).
Puisqu’il n’y a plus de convois, nécessitant trop de monde pour leur protection, nous nous habituons aux parachutages journaliers de 2 ou 3 avions. Tout ce qui n’est pas fragile (vêtements, rouleaux de barbelés, tabac, sac de riz, etc...) est largué sans parachute au plus près du sol. Tout le reste est parachuté, et il sera même utilisé des parachutes en papier (!). Les moutons pour les fêtes musulmanes seront parachutés vivants, de même que les cochons pour les partisans, ainsi que les canards et les poulets dans des paniers empilés les uns sur les autres. Les parachutes en tissu sont évidemment récupérés, roulés et stockés en attendant un hypothétique convoi (ils brûleront tous lors de l’attaque de Mai 50).
La garnison de Dong Khê est composée de 2 compagnies de tirailleurs marocains, d’une petite compagnie de partisans et de 2 canons de 105. Le tout est aux ordres du Capitaine Casanova, un officier vif, dynamique et attachant que j’apprécie beaucoup. /.../.
La population civile est assez réduite, 200 à 300 personnes, avec une importante communauté chinoise et l’inévitable maison de jeu.
Les journées passent en travaux d’aménagements des défenses et il y a beaucoup à faire. Nous ne recevons que très peu de ciment pour bétonner, aussi nous construisons beaucoup à la chaux et au sable ce qui ne présentera pas la même résistance que le béton aux obus. Mais pour faire de la chaux il faut des pierres de calcaire (il y en a à revendre) et du bois pour faire fonctionner des fours à chaux. Nous récupérons tout le bois disponible sur les maisons des villages des environs abandonnées, et je suis désigné " spécialistes des explosifs " pour abattre et débiter tous les arbres énormes que nous trouvons dans la cuvette." /.../.
Nous avons une popote sympathique pour notre petit groupe d’officiers, où le jeu " apéritif " journalier consiste à vider plusieurs chargeurs de pistolet sur des boîtes de conserve. Nous ferons ainsi beaucoup de progrès en tir instinctif." ( Réf. http://jaubert.chez.com/indchine.htm)

Il est temps à présent d'aller visiter la citadelle afin de voir ce qu'est devenue cette popote et de comprendre comment se sont déroulées les deux attaques de mai et septembre 1950...


NOTA : A la demande de monsieur Cyril Bondroit, éditeur et directeur de collection de la société Indo editions, et pour respecter le droit légitime au copyright, je précise que les photos 1 à 6 du présent billet sont extraites du livre "Les combats de la RC 4, Face au Vietminh et à la Chine, Cao Bang - Lang Son 1947-1950" , Indo Editions, Paris juillet 2004, écrit en collaboration avec le général Georges Longeret et le général Jacques Laurent.

Les photos suivantes, exception faite du cliché Google Earth, sont de moi et sont libres d'utilisation par les lecteurs de ce blog.

Je précise en outre que ce blog qui n'est qu'un journal de route... a pour seul but d'aiguiller les passionnés de la guerre d'Indochine vers la lecture des ouvrages publiés sur ce sujet (notamment chez Indo-Editions 61 rue de Maubeuge, 75009 Paris....) et de faciliter en même temps le déroulement du voyage de ceux qui souhaiteraient se rendre sur place. Rien de plus...



Les combats du Na Kêo

          En poursuivant l'ex Rc 4 en direction de Dong Khê, au niveau de la plaine de Na Pa on passe au pied du massif du Na Kêo où se déroulèrent une série d'affrontements qui après la chute de la citadelle survenue le 18 septembre 1950 marquèrent la première perte d'initiative majeure pour le commandement français dans la bataille de Dong Khê.

Afin de faciliter la compréhension d'ensemble et le positionnement des différentes photos, on peut utilement se reporter aux illustrations cartographiques tirées du livre "Les combats oubliés de la RC 4" et intégrer sur le terrain (croquis et photos) les témoignages regroupés dans les différents billets.


Rappel des évênements

Au cours des journées du 1er et 2 octobre, la colonne Lepage ( 1er et 11e Tabor, le BM du 8° RTM, le 1er BEP et les partisans) empruntant la RC 4 quitte That Khê et se dirige sur Dong Khê afin de réoccuper la localité prise par le vietminh le 18 septembre (opération Tiznit).
Après avoir vainement tenté de s'emparer de la citadelle de Dong Khê, une partie des éléments de la colonne Lepage s'installe en défense ferme sur les lignes de crêtes dominant à L'Est la RC 4 (1er BEP, 11° Tabor, 8° RTM) pendant que les autres tentent de "verrouiller" le secteur col de Loung Phaï - côte 307 ou assurent une couverture face au nord-ouest (1er Tabor)
Au cours des journées des 2 et 3 octobre, les différentes unités subissent l'assaut des troupes du Vietminh (combats du Na Moc, du Na Ngaum, de la côte 615, du Na Kêo) et submergées par le nombre doivent rompre le contact et se replier sur la RC 4 (Na Pa).

© Indo Editions - "Les combats de la RC4"


Le 3 octobre, après qu'une partie des unités a déjà commencé à glisser vers l'ouest (PC Lepage et 8° RTM  le matin puis 1er Tabor en fin de journée), une tentative pour évacuer les blessés sur That Khê est entreprise avec le sous-groupement Delcros (BEP et 11ème Tabor) dans la soirée mais elle échoue avec l'embuscade tendue à l'entrée du défilé de la 73/2 (voir billet précédent). Les dernières unités qui restaient au niveau de la RC 4 doivent se replier dans la nuit du 3 au 4 sous la pression vers l'Ouest, en direction des barrières rocheuses sur lesquelles stationne déjà le reste de la colonne avec le PC du lieutenant-colonel Lepage.
Le 4 octobre en fin de journée, les éléments rescapés de la colonne Lepage sont sur les lignes de crête dominant la piste de Quang Liet par où doit arriver la colonne Charton qui se replie depuis Cao Bang.

© Indo Editions - "Les combats de la RC4"


Le premier témoignage permettant de situer sur le terrain les combats des journées des 1er, 2 et 3 octobre 1950 nous est donné par le lieutenant Jaubert du 8° RTM et qui dans un premier temps avait gagné That Khê par la route. Il permet de comprendre comment s'est effectuée la marche de la colonne depuis le pont Bascou :
" La colonne LEPAGE est maintenant au complet avec quatre bataillons, mais pas d’artillerie. Nous ne savons pas exactement ce que nous venons faire, puisque maintenant nous savons que Dong Khê est tombé, et à part une demi-douzaine de légionnaires qui arriveront jusqu’à That Khê, tout le reste de la garnison a été tué (180) ou fait prisonniers.
Nous faisons quelques opérations autour de That Khê avec pas mal d’accrochages et nous sentons " qu’il y a du monde " en face. Enfin, le 1er Octobre à l’aube c’est le départ pour Dong Khê (30 km) qu’il faut reprendre...
Nous nous engageons colonne par un sur la RC4, dans la montée vers le col de Lung Phaï. Nous avançons " en perroquet ". Chaque bataillon va occuper le plus rapidement possible une portion de route et ses abords, puis est dépassé par un second bataillon et ainsi de suite.
Les deux Tabors sont en tête de la colonne, nous sommes en 3ème position, puis les paras ferment la marche. Après le col de Lung Phaï franchi sans incident, nous traverserons le sinistre " boulevard de la 73/2 ", une gorge étroite enserrée entre les rochers et la forêt, où une unité du Génie (la 2ème Cie du 73ème Régiment) a laissé beaucoup de " plumes " entre 1947 et 1949.
Quand c’est à notre tour de passer en tête, nous arrivons assez vite dans la petite cuvette de Na Pa à 3 ou 4 km de Dong Khê.
Ma compagnie qui était en queue du bataillon se retrouve maintenant en tête par la marche " en perroquet " qui fonctionne également à l’intérieur de chaque bataillon. Nous laissons passer les paras qui forcent l’allure. Si on peut arriver à Dong Khê par surprise, ce sera merveilleux, mais ce silence autour de nous est tout de même inquiétant.
1 km plus loin, les paras se trouvent nez à nez avec un détachement viet. Il y a échange de coups de feu et les premiers tués et blessés. Mais surtout l’alerte est donnée partout, et le petit poste que j’avais si bien construit en haut du piton Sud, ouvre le feu à son tour à la mitrailleuse.
Adieu l’effet de surprise ! Tout est bloqué et comble de malheur, une compagnie de mon bataillon qui tenait une hauteur à droite de la route est culbutée par une attaque viet aussi brutale que soudaine. Il y a donc beaucoup de viets de l’autre côté de la ligne de crête, ce qui nous sera confirmé par l’aviation qui emploiera le terme de " grouillement de viets " ça promet !...
Un Tabor est envoyé pour réoccuper la hauteur perdue, et pendant deux jours avec les goumiers puis avec les légionnaires envoyés en renfort, ce sera une bataille acharnée dite du Na Kêo, au corps à corps, avec des vagues viets successives attaquant en hurlant sans se soucier des pertes effroyables qu’ils subissaient. Mais pour nous aussi le bilan sera lourd et bien des camarades sont morts là-haut et y sont toujours...
Pour ma part, je suis toujours en réserve sur la route et j’assiste au parachutage de deux canons de montagne, qui ne serviront pas à grand chose et qu’il faudra détruire moins de 48 heures après.
En fin de journée, je vois le Colonel Lepage qui vient vers moi, et s’installe assis dans le fossé à mes côtés. Il a l’air las et me dit " Mon vieux Jaubert, qu’est-ce qu’il faut faire "...
C’est vraiment le genre de question à laquelle je ne m’attendais pas. Certes, il me connaissait depuis l’affaire de Dong Khê en Mai 1950, mais de là à lui donner un avis, alors que je n’étais que chef de section et simple exécutant, et que surtout j’ignorais la réalité de la mission qu’il avait reçue...
Devant mon étonnement, il m’explique : l’évacuation de Cao Bang, dont la garnison avec des centaines de civils forment la colonne Charton, qui se dirige vers Dong Khê, où nous devrions être installés pour les attendre et les recueillir.
Mais Dong Khê est maintenant imprenable, avec nos seuls moyens, alors que les viets sont tous rameutés sur nous et nous attaquent durement."

Probablement l'un des canons du lieutenant Claveranne...
(Musée de l'Armée à Hanoï)
(Photo JLM)


S'agissant des combats qui se sont déroulés au sud de dong Khê, différents témoignages permettent de préciser l'intensité des affrontements :

Le premier témoignage concerne la brève tentative du BEP se s'emparer de la citadelle de Dong Khê le 1er octobre en fin de journée et il nous a été donné par le sous-lieutenant Stien :
" Le 1er Octobre, le BEP, amené dans la nuit en camions jusqu’au Pont Bascou, démarre avec le jour. Très vite nous sommes bloqués dans la descente de Lung Phaï, le 8ème RTM est stoppé devant nous. Le jour est maintenant bien levé. Jeanpierre grommelle : 
- C’est trop lent, bon sang, c’est trop lent...
Manifestement la prudence prévaut sur la rapidité. Le Commandant Segrétain part devant avec Jeanpierre pour rejoindre le P.C. Lepage et faire activer. Après une demi-heure, la progression reprend enfin. Nous traversons la sinistre 73/2, nous doublons le 8ème RTM, la 1ère Cie grimpe sur le Na Kéo. Toujours pas un coup de feu.
Le peloton, en tête, accroche un groupe d’une dizaine de viets venant tranquillement à sa rencontre sur la route, en tue plusieurs, le reste se débande. Puis avec Jeanpierre, il fonce vers Dong Khé, mais se fait clouer au sol, par une mitrailleuse tirant de la citadelle. Jeanpierre demande tout le BEP pour l’attaque, mais le Colonel Lepage préfére la remettre au lendemain avec des effectifs plus importants et 2 canons qui seront parachutés."


Une autre description de cet assaut a été donnée par Pierre Sergent dans son livre ("Je ne regrette rien"), bien qu'il n'ait toutefois pas été présent au moment des faits :
" Au poste de Na Pa, Jeanpierre fulminait. Il se demandait pourquoi le reste du BEP mettait si longtemps pour le rejoindre. Depuis le matin, l'opération trainait. Le commandement voulait-il surprendre les Viets ou bien leur laisser le loisir de manoeuvrer ? Il était déjà 15 heures trente quand les compagnies arrivèrent à Na Pa où le peloton trépignait depuis près de deux heures... Enfin livré à lui même, débarassé du frein que Lepage semblait lui opposer mi par prudence, mi par crainte, le BEP pouvait manoeuvrer.
La 1ère compagnie occupa le piton du Na Kêo qui en effet, n'était pas tenu par les Viets. La 2ème compagnie se porta sur la côte 615 à un kilomètre plus au nord. Et le peloton, soutenu par la 3ème compagnie qui le suivait, continua sa progression vers le Nord, contourna l'ancien poste sud de Dong Khê. Il était arrivé à 800 mètres de la citadelle lorsque de longues rafales se firent entendre sur ses arrières. Deux ou trois armes lourdes situées dans l'ancien poste sud, prenaient violemment à partie la tête de la la 3ème compagnie.
Les mortiers du bataillon cherchèrent à neutraliser les mitrailleuses viets. Impossible ! Elles étaient solidement installées dans des blockhauss. Deux sections de la 3ème compagnie occupèrent alors le calcaire situé immédiatement à l'ouest de la RC 4 et au sud de l'ancien poste sud. Une troisième section tenta un débordement par l'est à flanc de 615 tout en cherchant la liaison avec la 3ème compagnie qui devait occuper la crête.
Quand au peloton, pris à partie, lui aussi, par trois armes automatiques au tir redoutablement précis, il se trouvait dans une souricière. Un tir de mortier déjà réglé s'abattait maintenant sur les hommes. /.../ .Décrochage immédiat. Repli dans le dispositif du BEP. /.../ ".

Sur la photo ci-dessous on peut apercevoir les contreforts de la côte 615, à l'entrée du village de Dong Khê, par lesquels s'est infiltrée une partie de la 3° compagnie du BEP dans la tentative de reconquête de la citadelle le 1er octobre en fin de journée :

Les contreforts nord de la côte 615
(Photo JLM)


Sur la photo ci-dessous on peut voir les pitons au niveau desquels se situaient les deux autres sections de la 3° compagnie et le découvert par lequel le PEG du BEP aux ordres du lieutenant Faulques, a tenté de donner l'assaut pour s'emparer de la citadelle : 

Les abords sud-ouest des entrées de Dong Khê
(Photo JLM)


Le schéma ci-dessous, tiré du livre de Pierre Sergent ("Je ne regrette rien") permet de situer quelques uns des points sur lesquels eurent lieu les combats.
Pendant la première phase de l'opération, le PC du colonel Lepage était implanté au niveau de l'ancien poste de Na Pa

© Pierre Sergent - "Je ne regrette rien"


A l'issue de cet essai infructueux, les élements du BEP s'installèrent pour la nuit du 1er au 2 octobre en garde face au nord, sur les contreforts de 615 :
" Le BEP s’établit pour la nuit sur 615, légérement boisé. Je m’installe sur un emplacement d’artillerie viet. Par l’étroite trouée aménagée pour le champ de tir du canon, on a vue directe et plongeante sur la citadelle, à 2000 m. Il y a du viet dedans, mais j’en vois assez peu, seulement de temps à autre quelques hommes qui se rendent d’un blockhaus à l’autre en portant des caissettes. Le disponible du 11ème Tabor, un goum (le 5ème) et le GCA, reléve notre 1ère Cie sur le Na Khéo, 1500 m au sud, sur le même mouvement de terrain que 615. Le P.C. « Bayard » rejoint le poste de Na Pa. La nuit est calme.
Le 2 Octobre, dés que l’aube pointe, j’observe la position ennemie. Il y a du monde dedans maintenant, et une colonne d’une centaine d’hommes venant du nord-est arrive encore en renfort. Un Morane d’observation signale que d’autres troupes se dirigent vers la citadelle et que de fortes colonnes font mouvement vers l’ouest sur la piste de Bo Bach, donc vers Na Ngaum et le Na Kéo. Les Viets se renforcent donc devant nous et acheminent du monde derrière nous. Ils ont assez de troupes pour faire les deux. Pendant ce temps là, le dispositif d’attaque de Lepage se met en place, le 1er Tabor déborde Dong Khé par l’ouest, les compagnies du BEP se déploient. Elles sont très vite prise à partie. La chasse intervient, mais sans grand résultat : les bo doïs disparaissent dans les blockhaus et les tranchées. Trois bons vieux junkers rafistolés en bombardiers larguent leurs bombes ainsi qu’un bidon de produit inflammable, qui tombe au beau milieu de la citadelle. Ce n’est malheureusement pas du napalm, dont nous ne disposons pas encore, l’effet est limité. Puis les King Cobra vont straffer la piste de Bo Bach « ça fourmille de viets » communique le leader. "


A la suite de ces premiers accrochages, le 2 octobre dans l'après midi, les troupes vietminh lancent deux violentes attaques en direction de l'Ouest et de la RC 4.

La première attaque se produit sur les mouvements de terrain du Na Moc et du Na Ngaum qui bordent la RC 4 à l'Est et qui se situent environ 4 kilomètres au sud du col de Loung Phaï. Le bataillon de marche du 4° RTM qui tenait ces crêtes est submergé et doit se replier en direction de Na Pa.
Le témoignage du sergent Amédée Thèvenet, qui appartenait au bataillon de marche du 8° RTM , permet de se rendre compte de la violence des combats :
«… Nous sommes le 2 octobre 1950. Le Bataillon de Marche du 8ème R.T.M. a quitté Lang-Son le 17 septembre, sachant déjà qu'il va au «casse-pipe». Tout le monde le sait.
Actuellement la 1ère compagnie, sous les ordres du Capitaine Feuillet, vient de s'installer en position défensive sur le piton Na-Ngaum qui protège la R.C. 4.
Vers l'Est, le terrain est dégagé et c'est du mont en face que nous voici soudain arrosés par le tir miaulant des mitrailleuses Skoda que nous connaissons bien. Sergent, chef de ces armes, c'est là que je fais pointer mes deux mitrailleuses Rebell, toutes neuves. Les Skoda se taisent quant retentit tout d'un coup, derrière nous, dans les broussailles, une sonnerie de clairon suivie d'un tonnerre de cris, de grenades et de mitraillage à bout portant. Une horde de petits bonhommes verts, couverts de feuillages tente de nous submerger. On est face à face, à dix contre un peut-être, avec d'un coté les Kalachnikov qu'on avait jamais vues, et de l'autre des P.M. 38 trop petits et de lourds fusils Enfield. Les tirailleurs essayent d'adapter leurs baïonnettes. Ils n'en ont pas le temps. Ils tombent comme des mouches. Le Capitaine Feuillet me fait un signe que je ne comprends pas et il tombe à son tour.
Plus de munitions. Il faut se replier, descendre sur la R.C. 4. Reprendre le combat, si on n'est pas trop blessé. C'est ce qu'on fera… jusqu'au 7 octobre, sur la côte 477, à la jonction de la colonne Charton."

Les hauteurs des massifs du Na Moc et du Na Ngaum
(Photo JLM)


La seconde attaque se produit en fin de journée du 2 octobre et intervient sur le massif du Na Kêo tenu par le BEP (côte 615)  et le 5° GOUM du 11° Tabor (sommet du Na Kêo).
Là aussi, le témoignage du sergent André Barbaud, qui appartenait au 5° GOUM du 11° Tabor, est particulièrement impressionnant :  
« … J'étais sous-officier radio au 5ème Goum du 11ème Tabor dans la bataille de Dong-Khé en octobre 1950. Après avoir franchi le col de Lung-Phaï, nous distinguons notre objectif, le Na-Kéo, piton dont l'intérêt stratégique était très important car il commandait le poste de Dong-Khé et la R.C. 4 et jamais nous n'aurions pensé qu'ils nous laisseraient prendre ce piton aussi facilement.
Le silence était angoissant, rien pas un viêt, quelques rafales tirées de loin, rien d'autre. Immédiatement, les champs de tirs sont dégagés, les sections installées, j'envoie mon premier coup de radio au PC LEPAGE qui, lui, était resté en bas du Na-Kéo, à Na-Pa : «Objectif atteint – pas un viêt – tout est OK». Fatigué après deux nuits blanches et beaucoup de kilomètres parcourus, hormis les sentinelles, tout le monde dort.
La nuit du 1 au 2 octobre se passe bien, pas de viêts.
Dans la journée du 2, nous remarquons côté nord-est de notre position de longues colonnes de viêts, coup de radio, le PC semble contrarié.
Ces colonnes représentaient les régiments viêts avec lesquels nous aurions à en découdre.
Le soir, vers 19 heures, le pilonnage commence, mortiers de 81 et obus de 75 tombent sur le Na-Kéo alors que nous étions en train de manger notre boite de rations avec l'adjudant Colonna de la section lourde, l'adjudant Fortin et le Sergent-Chef Leyssac. Ce fut l'enfer. Le 5ème Goum était commandé par les lieutenants Rebours et Casanove son adjoint, tués tous les deux le 3 au matin. Le Lieutenant Rebours était un officier de grande qualité, vétéran des campagnes d'Italie, de France et d'Allemagne. Toute la nuit, ce fut un déluge de mortiers et d'obus de 75 entrecoupés d'assauts des viêts, en ligne, ils attaquaient cinq, six fois, chaque fois repoussés avec des pertes énormes. Les goumiers, extraordinaires, se battaient comme des lions hurlants. Sur le matin, il fallut chasser les derniers viêts sur l'herbe du piton. Les munitions manquant, les goumiers allaient chercher les grenades et les munitions sur les viêts morts dans la pente, puis ils en arrivèrent au coupe-coupe et au poignard ; ce fut un rude corps à corps.
A six heures du matin, le Lieutenant Rebours vient me voir près de mon poste de radio et me dit : « je crois que ce matin les viêts ne décrocheront pas ». En effet, ils avaient l'habitude de lâcher prise dès l'aube par peur de l'aviation. Quelques minutes plus tard cet officier était mort, tué avec ses goumiers, immédiatement remplacé par le Lieutenant de Casanove, rassemblant les goumiers, sonnés après cette nuit d'enfer, mais au combat.
Le Lieutenant De CASANOVE tomba vers sept heures du matin, gravement blessé, un bras emporté. Dans le même temps, le Sergent-Chef LEYSSAC est tué. Nous étions assoiffés et presque sans munitions. Le BEP était en route pour assurer notre relève. Il fallait qu’il vienne vite car nous ne pouvions pas décrocher, c’eut été notre fin à tous.
Au cours d’un des derniers assauts, je me levais pour prendre part à la contre-attaque et retombais immédiatement. J’avais ressenti un immense choc à la jambe droite. Elle était brisée par une balle. Ali, mon ordonnance, me traîna dans la descente du Na-Kéo. Cette descente fût infernale. Me tirant par mon pied valide, nous sommes passés entre les viêts qui s’étaient infiltrés tout autour du piton. Admirable de sang-froid et de courage, il me sauva la vie. Enfin, nous sommes tombés sur une section du R.T.M. et le chef de section me confia à un immense tirailleur qui me descendit jusqu’au PC de Na-Pa où je reçus les premiers soins et enfin un brancard. Pendant ce temps, la bataille continuait sur le Na- Kéo où le B.E.P. était arrivé pour nous relever."

Le 11° Tabor étant pratiquement décimé, la 2° compagnie du BEP contre attaqua à son profit en direction du sommet du Na Kêo mais pendant cette action un important élément vietminh tenta de s'infiltrer par le col entre 615 et le sommet. Pris à revers par le PEG du BEP, cet élément fut rapidement détruit. 
L'extrait de carte Google Earth ci-dessous, permet de se faire une idée plus précise du nivellement de la zone dans laquelle eurent lieu les combats survenus sur le massif du Na Kêo entre le 1er et le 3 octobre 1950 :

Photo Google Earth


Ainsi qu'on peut le constater, le massif du Na Kêo s'étire du Nord au Sud en longueur à l'Est de la plaine de Na Pa comme une barrière "protégeant" les accès sud de Dong Khê.
Trois points de ce massif sont intéressants : 
- la côte 615 au nord sur laquelle le 1er BEP s'était regroupé en défense ferme d'abord face à Dong Khê le 1er soir puis face à l'Est le lendemain afin de faire face aux attaques du vietminh ;
- le sommet du Na Khêo au sud, défendu par le 5° GOUM du 11° Tabor puis réoccupé par le BEP suite à la mise hors de combat des Tabors ;
- le col au centre du massif par lequel les troupes vietminh tentèrent de s'infiltrer pour prendre à revers les éléments qui contre attaquaient au profit du 5° Goum du 11°Tabor. 

Le récit des combats du Na Kêo le 2 octobre et pendant la nuit du 2 au 3 a aussi été relaté par le sous-lieutenant Stien dans son livre "Les soldats oubliés" :
" La nuit tombée, c’est l’assaut sur le Na Kéo. Les goumiers se défendent admirablement et repoussent deux assauts. Toute la nuit nous entendons la fusillade, les explosions de grenades et des obus de mortiers. Puis à l’aube, nouvel assaut avec sonneries de clairon, corps à corps et victoire de justesse des goumiers à bout de munitions. Avec le jour arrive la chasse, qui mitraille au plus près.
Le BEP propose de se porter sur le Na Kéo, mais Delcros reçoit de Lepage, en route vers 765, l’ordre de maintenir le BEP sur 615, position qu’il tient pour essentielle.
Selon le Colonel Lepage, notre présence fait peser une menace sur Dong Khé et immobilise donc d’importantes forces viets tout en protégeant le flanc gauche du 11ème Tabor. C’est indiscutable.
- Peut être me dit le Capitaine Jeanpierre, mais si le Na Kéo tombe, 615 est cuit.

Le commandant Segrétain décide de placer le peloton en bas face Est de 615. Les viets peuvent s’infiltrer par là, autant pour nous déborder que pour attaquer le Na Kéo. Désoeuvré sur 615, j’accompagne le peloton pour son installation. Le peloton d’élèves gradés du BEP est une unité extraordinaire. Rien que des volontaires, ayant tous de 2 à 7 ans de guerre derrière eux. J’avais été pendant deux mois leur instructeur, adjoint au Lieutenant Faulques, avant d’être appelé au poste d’adjoint au Chef de Bataillon. J’avais pu apprécier le mordant, la discipline et la valeur de cette phalange surentraînée. A leur tête, Faulques, un homme de guerre comme on en voit peu, pugnace, audacieux et manœuvrier.
Le peloton se place en embuscade. Camouflage parfait et silence absolu. Et bientôt une colonne viet arrive. Le tir massif du peloton se déclenche au signal, à bout portant, sur l’unité engagée dans la nasse. Un massacre et une déroute. Excellents dans l’assaut, les Viets réagissent très mal en cas de surprise.

Je remonte au P.C. Une nouvelle attaque est en cours contre le Na Kéo. A la jumelle on peut distinguer les combattants entremêlés. La chasse arrive et mitraille au plus prés, sur le Na Kéo même. Les viets refluent mais se regroupent pour l’assaut définitif. La situation est désespérée, mais le Commandant Delcros obtient enfin de Lepage que le BEP abandonne 615 et le relève. 
Le Commandant Segrétain envoie immédiatement ce qu’il a de plus proche, la 2ème Cie. La section Chauvet démarre au galop, et prend à revers les viets prêts à bondir. C’est la surprise, le massacre. Le reste de la 2 arrive au pas de course et complête la déroute.
Le P.C. arrive rapidement sur le Na Kéo. Les goumiers sont à bout, épuisés, sans munitions. Leurs pertes sont lourdes. Ils enterrent sommairement les morts, descendent avec leurs blessés au poste de Na Pa. Pédoussaut, notre Capitain- médecin donne un coup de main à son collègue Lévy, du 11ème Tabor. Le 11ème Tabor a mené un combat exceptionnel, digne de tous éloges. Mais cette unité fraîchement débarquée a eu un baptême du feu trop éprouvant, avec les assauts furieux des viets, le corps à corps, et aussi des pertes du fait de notre chasse, qui par défaut de balisage au sol, a un temps tiré dans la masse confuse des combattants entremêlés. C’est une unité définitivement brisée qui nous céde la place. Elle ne pourra être d’aucun appoint dans les combats des jours suivants.

Le BEP s’installe en défensive, le P.C et la CCB légèrement à contre pente avec comme seule réserve le peloton et le groupe de partisans. Toutes les compagnies sont nécessaires sur la crête, car derrière nous, il n’y a aucun recul, la pente vers la plaine de Na Pa est abrupte. Le terrain est favorable aux assaillants : le Na Kéo va en pente douce vers l’est, avec des talwegs qui permettent l’approche. La partie s’annonce dure : nous ne disposons d’aucune défense accessoire, mines ou barbelés, et nous sommes nettement surclassés en nombre et en puissance.
Les Légionnaires occupent les emplacements de combats existants, ils en creusent rapidement d’autres, sous le tir de harcèlement de l’adversaire. Par radio, le Capitaine Bouyssou annonce au P.C la mort du Lieutenant Meyer, tué d’une balle de mitrailleuse, alors qu’il installait sa section.
Les Viets n’ont pas renoncé. Ils veulent à tout prix le Na Kéo. Vers 15 heures, le pilonnage reprend. 
Les vagues d’assaut viets se mettent à nouveau en place. Des cris d’assaut résonnent, accompagnés de coups de sifflets, mais l’adversaire reste invisible.. Les viets voudraient bien que nous tirions et dévoilions ainsi nos postes d’armes automatiques. La discipline de feu est totale, pas un coup de feu n’est tiré, les légionnaires-parachutistes restent blottis dans leurs trous tant que l’adversaire n’est pas en vue. Et c’est ensuite le véritable assaut en masse des petits hommes en vert. Quand l’assaillant est à moins de cinquante mètres, les légionnaires se dressent et ouvrent un feu dévastateur. Le BEP a depuis peu été équipé en pistolets-mitrailleurs de 9 mm, le M.P.40 allemand, au lieu du minuscule P.M.38 français, de calibre 7,65 long. La puissance d’arrêt est considérablement augmentée. La première vague d’assaut s’écroule, la seconde de même, les grenades dispersent les survivants.

La chasse survient et achève le travail. Le spectacle est superbe. Les King Cobra straffent les talwegs que nous lui désignons. Avec les chasseurs, c’est entre nous une vieille complicité, une longue habitude de travailler ensemble sur le champ de bataille mais aussi de commenter les résultats, et la méthode en rentrant à Hanoï, autour d’un pot. Ils ont confiance en nous et nous en eux. Ils tirent au plus prés selon nos indications. Les douilles de 12,7 nous tombent dessus, mais ce sont nos adversaires qui prennent les coups, dans les replis du terrain, à 50 mètres. A 1 500 mètres, je vois nettement un groupe de mitrailleuses de D.C.A arroser les avions dans leur ressource. Le Lieutenant De Borde leur tire dessus au 81. Les viets nous répliquent au 75 et au mortier. Pour ne pas être à la traîne, Claveranne envoie des giclées de 3 pouces 7 sur la citadelle (le pauvre ne peut pas tirer ailleurs !).

Les chasseurs partent mitrailler plus loin, sur les réserves viets, puis nous quittent après un dernier rase-motte sur le Na Kéo en battant des ailes. On distingue la tête des pilotes, on leur fait signe de la main. Ils ne sont pas relevés par d’autres avions.
Profitant du straffing de la chasse, un J.U 52 a largué ses colis sur notre position étroite. Nous avions demandé des munitions, surtout des grenades dont on fait une large consommation, ainsi que des obus de mortiers. Une faible partie du matériel tombe sur la crête, quelques colis dans la plaine de Na Pa, mais la majorité chez les viets. Et catastrophe, nous avons les corps de grenade et d’obus de mortier, mais la plupart des bouchons allumeurs et des fusés sont tombés ailleurs. Ce qui est utilisable est rapidement distribué.

Le bruit d’explosions de mortiers nous parvient de l’ouest de Dong Khé. Ainsi les viets attaquent en même temps le Na Kéo et le reste de la colonne Lepage, qui va au devant de Charton.
Le jour tombe, le BEP se prépare à de nouveaux assauts. Les obus de 81 et ceux de 75 continuent à arriver à cadence lente. C’est du harcélement, sans dommage pour nous. Les trous individuels ont été approfondis, et les coups isolés de 75 de montagne ne sont guère dangereux. Les pièces tirent de 2.000 mètres environ, en tir direct, depuis des grottes de falaises calcaires. On voit d’abord la flamme de départ, puis nous parvient la détonation suivie de très prés par le bref sifflement aigu de l’obus qui arrive.
La nuit tombe et l’artillerie augmente sa cadence. C’est maintenant un tir de préparation. A peine cesse-t-il que le second assaut hurlant arrive, se maintien vague après vague. Nos 81 et nos 60 ont beau tirer au plus prés, l’attaque viet progresse, marchant sur ses cadavres. L’attaque principale est axée sur la 3, qui risque d’être submergée et débordée. Les compagnies voisines ont-elles-mêmes affaire à forte partie. Le Commandant Segrétain fait donner la garde : le peloton fonce dans la fournaise soutenir l’aile gauche de la 3 et refoule l’assaillant. Puis c’est l’aile droite qui est menacée par cet assaut continu. Je suis la seule réserve avec mes 10 partisans ! Nous y courons et trouvons quelques vagues trous d’où l’on commande une légère coulée vers l’Est. A peine sommes nous installés que l’assaut reprend, à coups de sifflets et de cris « Alasso ! ». Les silhouettes des assaillants se détachent dans les lueurs d’explosions. Les P.M. crachent et les grenades volent de part et d’autre, les bo-doïs avancent avec un courage extraordinaire. Je dois vider un demi chargeur de carabine sur un assaillant hurlant pour le voir enfin s’effondrer prés de mon trou. Puis les flash de l’explosion des grenades montrent un adversaire qui se replie, trébuchant sur ses cadavres.
Partout l’assaut est brisé, les armes se taisent, de proche en proche. Quelques coups de feu isolés claquent, tirés sur des ombres allongées qui bougent encore. Puis après une pause, quelques simulacres d’attaque, avec cris et sifflets, pour user nos munitions et nous briser les nerfs. Les voix sont trop peu nombreuses, rien ne débouche, ça ne prend pas. La discipline de feu est très vite rétablie, personne ne tire. Un silence relatif s’installe.
Je reprends ma place en réserve, prés du P.C. Le médecin Capitaine Pédoussaut soigne à tour de bras les blessés graves qu’on lui amène, et qu’on descend ensuite à l’ancien poste de Na Pa. Les blessés légers, restent à leur poste, soignés par les infirmiers de compagnie. Des viets blessés à mort sont venus, dans leur élan, s’effondrer à l’intérieur de la position de la 3. L’un d’eux vit encore, serrant toujours son fusil-mitrailleur Skoda tout neuf. On l’amène au P.C où je retrouve aussi le Sous-Lieutenant Cornuault, de la 3, qui a ramassé une balle de 9 mm dans la cuisse. 
Pedoussaut soigne le Viet, avec le même dévouement qu’il apporte à nos hommes. Le blessé est encore conscient. Il a deux balles dans le ventre et a perdu beaucoup de sang. Il est perdu. Je demande la permission de lui faire poser quelques questions.
- Pas plus d’une minute, me dit Pedoussaut.
Nos adversaires ont fait preuve d’un courage qui force le respect. Hoï réconforte le blessé, l’interroge avec douceur, comme un camarade.
- C’est le Régiment 246, me dit il.
On en reste là, pour laisser le bo-doï mourir en paix, Pedoussaut lui fait une morphine... Je lui suggère :
- Mettez lui donc une fiche de soins, avec mention du 1er BEP. Il y a longtemps que les Viets nous ont identifiés, et ça peut faire préserver ceux de nos blessés qui tomberaient entre leurs mains…

Ainsi le 246 de Po Ma est remonté jusqu’ici pour renforcer la 308 et son bataillon lourd. 
Le nombre important des blessés est une nouvelle donne : avec ceux du 11ème Tabor , cela en fait plus d’une centaine qui sont maintenant regroupés dans les ruines du poste de Na Pa. Parmi eux, une quarantaine sont à transporter. Beaucoup ont besoin d’une opération pour avoir une chance de vivre. En outre, ils nous enlèvent toute mobilité. Dans un terrain pareil, il faut au moins 8 hommes par brancard. De quoi occuper plus de la moitié des hommes valides, et ralentir notre allure à 1 kilomètre à l’heure. Les viets, débarassés du soucis de leurs blessés transportés à l’arrière par leur armée de coolies, ont alors une supériorité de vitesse de déplacement écrasante.
Delcros, Segrétain, et Jeanpierre sont d’accord :
- 1) notre maintien sur le Na Kéo ne suffit pas à fixer les forces adverses
- 2) De toutes façons, le Na Kéo tombera en 24 ou 36 heures, anéantissant le BEP et enlevant ainsi aux faibles forces de Lepage une troupe qui pourrait le renforcer à l’avant.
- 3) Il faut pouvoir rejoindre Lepage sans la charge des blessés.
- 4) Pas question d’abandonner ceux-ci aux viets.
La solution serait donc de se replier de nuit vers le col de Lung Phaï, d’y laisser les blessés qui seront évacués sur That Khé par les goums qui tiennent le col et 703, tandis que les hommes en état de combattre rejoindraient Lepage en passant à l’ouest de la barrière de calcaire. Le terrain y est plus facile et permettrait de rejoindre Lepage et Charton très rapidement.
« Bayard » accepte la solution, et Jeanpierre fait transmettre verbalement les ordres aux commandants de compagnie. Silence radio pour ce mouvement, mais au contraire activité de radio pouvant laisser croire à l’adversaire que nous renforçons notre défense. Claveranne, l’artilleur, reçoit l’ordre de tirer ses obus sur Dong Khé puis de saboter sa pièce montée à Na Pa.
C’est la 2 qui quittera le Na Kéo en dernier, en simulant jusque là une activité sur l’ensemble de notre position.
Nous sommes le 4 octobre, le décrochage commence vers 3 heures du matin. Il crachine. Je descends la pente raide du Na Kéo et rencontre Claveranne qui, la mort dans l’âme, sabote sa pièce. Il a glissé dans l’âme du canon une grenade incendiaire spéciale qui fait fondre l’acier et soude la culasse au tube. Dans la clarté rougeâtre qui sort du tube, je vois l’artilleur s’essuyer les yeux.
Le sous groupement Delcros s’engage dans la 73/2. En tête ceux du 11ème Tabor, le 8ème RTM (restant de la Cie Feuillet), les blessés, le BEP suivra. Jeanpierre part vers l’avant avec Delcros."


La photo ci-dessous permet de voir l'ensemble du massif du Nakêo qui domine à l'Est la plaine de Napa et la RC 4. On distingue donc de la gauche vers la droite, à l'extrémité nord la côte 615, on devine au centre le talweg par lequel le vietminh tenta de s'infiltrer puis vient le sommet du Na Kêo :

La RC 4, la plaine de Na Pa et le Na Kêo
(Photo JLM)


Sur la photo ci-dessous qui montre les abords sud du Na Kêo, on peut voir la zone où devait sans doute se situer l'ancien poste (probablement dans le secteur de la petite maison blanche) et où le lieutenant-colonel Lepage avait initialement installé son PC.
Le sous-lieutenant Meyer de la 2° compagnie du 1er BEP, tué lors de l'implantation de sa section en bordure du versant sud du Na Kêo après la relève du 11° Tabor, a été inhumé au sommet (a priori partie centrale) mais il est bien entendu impossible de retrouver une quelconque trace de sa tombe (ainsi que des autres sépultures) en raison de l'importante végétation qui y a poussé depuis 1950.


Les abords sud du Na Kêo
(Photo JLM)


Vue sur le massif du Na Kêo depuis Dong Khê
(Photo JLM)


Les contreforts de la côte 615 aux abords immédiats de Dong Khê
(Photo JLM)


Après ce point de situation relatif à l'un des combats les plus intenses de la bataille de Dong Khê, il est temps de continuer notre progression en direction de Dong Khê pour voir enfin à quoi ressemblait ce poste si âprement disputé...